Le pianiste entre émotion et virtuosité
Pour Ignace Paderewski, le piano est comme une seconde langue maternelle. Compagnon de jeu d'une jeunesse pauvre en distractions, l'instrument lui permet de se conquérir lui-même avant de conquérir le monde. Dans le sillage des grands virtuoses de l'ère romantique – Chopin et Liszt en tête –, il sillonne la planète à un rythme vertigineux, amassant gloire et cachets exorbitants qu'il va bientôt mettre au service d'un nouveau combat – patriotique. Chez lui la virtuosité n'est jamais gratuite: elle est d'abord vecteur d'émotion. On l'acclamera jusqu'à la dernière note, même si le débit des cascades s'est quelque peu ralenti depuis les débuts parisiens de 1888 ou les tournées en train spécial à travers l'Amérique.
Le compositeur en quête d'absolu
On ferait bien aussi de se souvenir de sa musique qui, si elle ne saurait rivaliser sur le plan quantitatif avec la masse de ses concerts, porte en elle la même flamme d'absolu. Couronnée par son unique opéra Manru créé à Dresde en 1901, son œuvre se limite (à quelques exceptions près) aux quatre premières décennies de son existence et témoigne sans surprise de son amour immodéré pour le clavier.