Lettre adressée par Doda Conrad, vice-président du Paderewski Testimonial Fund à New York, à «mon cher Président» Paderewski, le 29 avril 1941
Lettre adressée par Doda Conrad, vice-président du Paderewski Testimonial Fund à New York, à «mon cher Président» Paderewski, le 29 avril 1941
Lettre adressée par Doda Conrad, vice-président du Paderewski Testimonial Fund à New York, à «mon cher Président» Paderewski, le 29 avril 1941
Lettre adressée par Doda Conrad, vice-président du Paderewski Testimonial Fund à New York, à «mon cher Président» Paderewski, le 29 avril 1941
Lettre adressée par Doda Conrad, vice-président du Paderewski Testimonial Fund à New York, à «mon cher Président» Paderewski, le 29 avril 1941
N° d'inventaire:
PADEREWSKI-TESTIMONIAL-FUND-1941
Type:
original
Date:
29 avril 1941
Source:
coll. Musée Paderewski, Morges

Arrivé de France à New York le 5 novembre 1940, Paderewski vit ses derniers mois de vie en exil aux Etats-Unis. Le pays célèbre en grande pompe cette année-là le 50e anniversaire de ses débuts américains, avec à la clé de nombreux événements (comme ce concert choral donné le 4 avril 1941 à Carnegie Hall sous la direction de Nadia Boulanger) et la création d'un Paderewski Testimonial Fund (qui sera actif jusqu'en 1959). Doda Conrad, le vice-président de cette Fondation qui signe ces lignes, ne peut imaginer que son «cher Président» décédera deux mois plus tard jour pour jour des suites d'un refroidissement. Polonais naturalisé américain réputé pour sa voix de basse, Doda Conrad (1905-1997) s'est formé à Paris – à l'Ecole Normale et auprès de Nadia Boulanger – où il a fréquenté le Groupe des Six mais aussi Picasso (qui lui conseille de se mettre à la peinture), Stravinski et Saint-John Perse. Après ses adieux à la scène en 1965, il se consacre à la promotion musicale en fondant notamment la Saison musicale de Royaumont.
[idem B-LETTRE-B2-A-NORTON-GALLERY-1941-04-17]

«Mon cher Président, malgré les scrupules que je puis avoir de vous importuner, veuillez me permettre de vous soumettre malgré tout le document suivant qui me semble constituer, dans la sécheresse même de l'éloquence des chiffres, un des témoignages particulièrement émouvants de gratitude et d'admiration qui vous aient été offerts dans ce pays au cours de ces derniers mois.

»En fait, ce document est significatif non seulement en ce qu'il est un hommage à la Pologne à travers le symbole de votre nom, mais aussi, tout simplement, parce qu'il est un geste infiniment encourageant du point de vue de la Musique, de son avenir et du sentiment d'Idéal sans lequel la pérennité de tout effort artistique est compromise.

»Ceci est le compte qui vient de m'être remis concernant les frais supportés par les 104 choristes, élèves de la Normal State School de Potsdam (NY), qui ont fait le voyage de New York pour venir prêter leur concours au concert qui a été donné en votre honneur le 4 avril à Carnegie Hall, sous la direction fervente de Mademoiselle Nadia Boulanger.

»Non seulement les organisateurs de ce concert n'ont-ils eu à remettre aucune indemnité de déplacement à cet ensemble de merveilleux chanteurs dirigés par Miss Helen Hosmer, mais au contraire un chèque de plus de cent dollars nous est-il remis sous forme de donation alors que nous nous attendions à devoir débourser tout au moins les frais de transport et de logement (douze heures de chemin de fer, quatre jours de séjour à New York!)

»Ces jeunes gens ont pris à leur charge, dans un sentiment d'enthousiasme désintéressé véritablement admirable, près de deux mille dollars que représentaient les frais (une petite partie seulement de la somme nécessaire ayant été réunie par les généreux efforts d'un comité local).

»Ceci dit, ils ont tous chanté comme des anges: d'un bout à l'autre par cœur (ce qui est presque sans précédent, surtout si l'on considère la difficulté du programme) et avec une pureté de sonorité et une musicalité impeccables.

»Je tenais, mon cher Président, à vous signaler cet épisode, un des plus remarquables qu'il m'ait été donné de rencontrer depuis que j'ai la joie et l'honneur de joindre mes modestes efforts à ceux de l'admirable Madame [Vernon] Kellogg, pour essayer d'apporter quelque soulagement aux souffrances sans nom de mes malheureux compatriotes.

»Veuillez trouver ici, Monsieur le Président, l'expression des sentiments de ma respectueuse admiration et l'hommage de mon profond et sincère dévouement.»